Concrétiser sa recherche d’emploi sur les réseaux sociaux
J’ai répondu aux questions liées à la recherche d’emploi sur les réseaux sociaux, que m’a posées par Julien Pompey, responsable du Service Communication de l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne et rédacteur en chef du Sorbonn@ute, pour sa rubrique « Sorbocoach ». LinkedIn, Twitter, Facebook… comment optimiser sa recherche, bien se servir de chacun de ces réseaux sociaux, et surtout « concrétiser » le passage à l’acte ? Quelques conseils pouvant servir aussi bien à celles et ceux qui sont à la recherche de leur premier emploi, comme aux autres en « transition professionnelle ».
Consultant en communication digitale, Franck Confino répond aux questions du Sorbonn@ute relatives à la manière de bien utiliser les réseaux sociaux dans sa recherche d’emploi et de réussir sa prise d’initiative.
LinkedIn, Twitter, Facebook… sur quel réseau social doit-on miser actuellement pour trouver un emploi ?
« Aujourd’hui, beaucoup d’offres d’emploi ne passent plus que par LinkedIn et Twitter. L’oiseau bleu peut sembler aux novices moins ‘évident’ pour l’emploi que LinkedIn, pourtant beaucoup d’offres exclusives y circulent grâce aux communautés réunies autour de ‘hashtags-métiers’. Il existe sur Twitter une forme de cooptation entre pairs, et des communautés bienveillantes comme #votrejob ou #i4emploi, pouvant accélérer le lien entre offre et demande. Ce dernier collectif revendique déjà plus de 6 millions de tweets et près de 1000 influenceurs soutenant les demandeurs d’emploi et les personnes en recherche active sur le réseau social. À ce jour, environ 14.5 % des personnes ayant sollicité le collectif ont retrouvé un emploi. Ce n’est pas non plus un hasard si Pôle emploi a ouvert plus de 800 comptes Twitter, administrés par ses agences locales. Au final, 20 % des offres d’emploi en France sont publiées sur Twitter, près de 80 % des inscrits l’utilisent pour effectuer une veille professionnelle, et 60 % des Twittos y consultent les offres d’emploi.
LinkedIn reste ‘mainstream’ avec ses 12 millions de membres et ses 6 millions de visiteurs uniques mensuels en France. Il y a bien sûr un côté ‘CV en ligne’ qui, contrairement au ‘CV papier’, ne peut pas être truqué, enjolivé, ni adapté, et qu’il faut remplir au maximum, y compris en demandant des recommandations à ses précédents employeurs, ce qui peut être fort utile pour crédibiliser un profil à ses débuts. Mais l’essentiel va se jouer du côté des publications, interactions et conversations. LinkedIn est devenu un vrai Facebook dédié au monde du travail. Publiez des posts ou des articles (sur le blog natif), commentez, participez à des groupes de discussion, car c’est vraiment là que ça se joue !
Enfin Facebook, qui a décidé de concurrencer LinkedIn sur le juteux marché de l’emploi, va ouvrir la possibilité aux entreprises de publier des offres d’emploi sur leur page. Les candidatures transiteront par Facebook Messenger, après qu’un candidat aimant la page ait cliqué sur le bouton ‘Postuler’. Je sais que Facebook mise beaucoup sur cette nouvelle fonctionnalité, en test depuis l’automne dernier. Le réseau y mettra donc de gros moyens. Toutefois, j’entends beaucoup de freins, notamment du côté des candidats, qui ne veulent pas du mélange vie privée / professionnelle. Mon avis sur son succès reste donc mitigé : à suivre… Quoi qu’il en soit, c’est une nouvelle piste à tenter et, pour répondre à votre question, il faut bien être partout, en maniant l’art de l’ubiquité ! »
Comment bien se servir de chacun de ces réseaux dans le cadre de sa recherche d’emploi ?
« Sur Twitter, la difficulté réside peut-être dans le bon équilibre à trouver entre la nécessité absolue d’être soi-même et de rester professionnel. Afin de bien utiliser ce réseau social dans ce cadre, il faut définir une stratégie et fixer une ligne éditoriale claire. Il est nécessaire qu’en balayant votre TL, n’importe quel recruteur puisse identifier les sujets qui vous intéressent, et sur lesquels vous avez une expertise avérée. Pour cela, une veille est indispensable mais pas suffisante. Ce qui importe, c’est plutôt la curation, c’est-à-dire la contextualisation, soit l’avis ou la valeur que vous ajoutez à l’information relayée. Ce qui compte plus que tout, ce n’est pas tant la publication que la qualité des interactions. N’oubliez pas que le web est essentiellement conversationnel ! Suivez les entreprises dans lesquelles vous aimeriez travailler, intéressez-vous à elles et interagissez. Pas mal de structures ne recrutent pas ‘ouvertement’ : elles repèrent des candidats idéaux et leur proposent directement une offre ! Si vous avez déjà créé du lien, ce sera un vrai plus pour vous faire remarquer. Par ailleurs, lorsque vous publiez une annonce de demande d’emploi, sachez manier les ‘codes’ du réseau, y compris de langage. N’abusez pas des hashtags mais sachez repérer ceux de votre secteur, comme ceux qui vous donneront le ‘coup de pouce’ nécessaire : #i4emploiR est l’un d’entre eux. Mettez un ‘concentré de votre CV’ en image, ce qui vous permettra de vous présenter en plus de 140 caractères, et un lien vers votre profil LinkedIn ou votre blog, si vous en avez un. Sur cette image, taguez 10 ‘influenceurs’ : même si vous n’êtes suivi que par 10 personnes, si l’une d’entre elles ayant 10 000 abonnés vous retweete, l’audience de votre annonce sera alors de 10 010 personnes potentiellement ! Enfin, précisez un ‘call to action’ dans votre message, du type ‘RT appréciés’ : les tweets qui précisent cette ‘évidence’ sont beaucoup plus relayés.
Même conseil principal pour LinkedIn. Au-delà de votre profil, qui doit être entièrement rempli pour une meilleure visibilité, faites-vous surtout remarquer par votre expertise, qui doit être lisible au travers de vos publications. Le Graal, ce n’est pas tant le relai d’une publication (à la portée de tout non spécialiste) que la publication d’un article rédigé par vous-même. Utilisez aussi à bon escient les fonctionnalités propres à la plateforme comme la ‘Recherche avancée’, qui vous permet de trouver des emplois par secteur d’activité, lieu géographique, entreprise, niveau d’expérience, mots-clés, etc. Enfin, comme sur n’importe quel réseau social, le virtuel pour le virtuel n’a aucun sens. Le véritable intérêt est de ‘passer de l’URL à l’IRL’, c’est-à-dire de pouvoir rencontrer ‘en vrai’ les personnes de votre réseau. Les occasions sont nombreuses : salons, rencontres professionnelles, événements… Profitez de chacune d’entre elles. Vous exploiterez alors le meilleur de ces plateformes, car vos ‘contacts’ et autres ‘followers’ vont démultiplier les opportunités de contacts bien réels. Le lien créé d’URL à IRL est une force réelle ! »
Justement, comment réussir la prise d’initiative et le passage à l’action en vue de contacter un recruteur ?
« Une récente étude réalisée par PageGroup révèle que 85 % des candidats présents sur Twitter n’ont jamais contacté de recruteur en direct. Cela révèle un manque de connaissance des codes du réseau social et la difficulté réelle de ce ‘passage à l’acte’. C’est en effet une phase délicate et mieux vaut ne pas y aller avec des ‘gros sabots’… Mon premier conseil n’est pas valable que sur les réseaux sociaux : il faut d’abord savoir donner, sans espérer quelque chose en retour, avant de peut-être recevoir. En tout premier lieu, il est nécessaire de s’intéresser aux autres, avant qu’on s’intéresse éventuellement à vous. Pour réussir, il faut être patient et persévérant dans cette forme de générosité. Trop souvent, je vois des candidats n’ayant quasiment jamais tweeté, ni retweeté personne, demander de RT leur demande d’emploi. Trop souvent, je vois des gens, avec qui je n’ai jamais parlé et échangé, commencer une ‘conversation’ en privé, pour demander un service qui ressemble à un ‘copier-coller’. Pire : même pas un ‘merci’ si on leur rend… C’est absolument contre-productif ! De ce fait, plus vous aurez créé de lien réel avant de publier votre demande d’emploi, plus vous aurez rendu de services désintéressés avant, plus vous serez légitime pour en demander un, le moment de l’annonce venu. Autre conseil : sur Twitter, sauf exception des messageries ouvertes, il faut avoir été suivi par une entreprise pour pouvoir échanger des messages privés avec elle. D’où l’intérêt réitéré d’avoir créé un lien réel et avéré avant, pour la contacter par la suite. Si l’entreprise ne vous a pas suivi en retour, n’hésitez pas à l’interpeller publiquement.
Un dernier conseil, autant valable pour une lettre de motivation qu’un message d’approche envoyé en privé sur les réseaux sociaux : évitez absolument les copier-coller et oubliez ces formules toutes faites que vous lirez dans les guides. Lorsqu’un recruteur reçoit 400 lettres de motivation commençant par ‘votre entreprise est leader dans son secteur’, il ne les lit même plus ! Démarquez-vous et soyez original ! Pour une candidature spontanée, expliquez brièvement pourquoi vous postulez, mais sortez de la norme devenue insupportable de ces carcans rédactionnels. Privilégiez un petit mot rapide en allant droit au but : qu’est-ce qui peut intéresser cette entreprise dans votre profil ? Et pourquoi vous intéresse-t-elle ? Si l’accroche fait mouche, vous pourrez sortir ‘le grand jeu’. Montrer que vous maîtrisez les codes pour mieux les casser, ce qui sera la meilleure manière de ‘hacker’ votre premier emploi ! »
Diplômé de l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne notamment, Franck Confino est consultant stratégies digitales et marketing territorial, formateur professionnel et auteur de plusieurs ouvrages dont « Maîtriser sa communication publique numérique : enjeux, outils et stratégies » (Editions Territorial, Janvier 2017, avec Benjamin Teitgen).
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— Julien Pompey (@JulienPompey) 21 mars 2017